vendredi 30 novembre 2012

La légende de McArthur, partie 1

Voici la première partie d'un roman de CAPE et d'épées ou le clan McArthur parle du mythique village des marques.

Premier épisode :

Les promoteurs du projet en déroute de Village des marques à Douains avaient leurs motivations, les opposants leurs raisons.
Reste à l'occasion de cet échec à se reposer quelques questions sur le fond, que ni les uns ni les autres n'ont probablement trop voulu éclaircir pour les citoyens.
Dans une économie en quasi-récession, sous une crise d'endettement et de compétitivité sans précédent entrainant l'entrée dans une période d'austérité générale et de chômage aggravé, l'implantation d'une entreprise étrangère de vente massive de textile importé constitue t-elle un projet profitable, cohérent, durable en termes d'emploi, de dynamisation, d'environnement et de contributions à l'activité locale ?
On peut en douter.
Agir localement, penser globalement disent nos compétiteurs écologistes. Ils ont raison sur ce point.
Si l'Eure et plus particulièrement le périmètre de la CAPE était un bassin notoire de production textile, de transformation ou de création à valeur ajoutée, la pertinence du modèle économique du projet tomberait sous le sens. Mais ce n'est pas le cas. Désindustrialisées, nos régions françaises ne produisent et ne transforment presque plus pour les marchés de grande consommation majoritairement approvisionnés par les pays à bas coûts. Alors ?
S'agit-il de capter le pouvoir d'achat des hauts-normands en matière de prêt-à-porter par la localisation de l'offre et d'éviter l'évasion vers la région parisienne du marché local, celle des ressources fiscales subséquentes ?
Auquel cas à défaut d'empocher les bénéfices de la production (faibles) et de la création (forts), nous ne récolterions que les miettes de ceux de la seule distribution (la grande au détriment de la petite). Ceci essentiellement par des salaires et des taxes induites.
Nous serions déjà dans le ligne du grand renoncement dicté par nos élites : l'abandon de nos pôles d'excellence dont la mode était un phare, la chaine des sous-traitants le moteur. Je sais, c'est du passé. D'industriels ou de créateurs nous serions aujourd'hui voué à nous reconvertir en super-boutiquiers, mondialisation oblige.
Voilà donc l'affaire ?
Eh bien non, ce n'est pas le cas car nous ne serions donc, avec MacArthurGlenn, même pas capable de trouver un investisseur et un entrepreneur français pour vendre des chiffons-griffés surement déstockés vaguement enrubannés et faussement bradés.
Eh bien non encore, ce n'est même pas non plus le cas puisque le concept et la promesse fondamentale du projet est précisément de drainer une clientèle extérieure. Le marché et le pouvoir d'achat local est trop petit, (voire en décroissance probable), pour absorber les ordres de grandeur de chiffre d'affaire qui intéressent un groupe comme MacArthurGlenn.
Est-ce là la gloire de nos managers public en développement territoriaux, économiques ?
Pour le dire vulgairement, est-ce là leur raisonnement : les normands de l'Eure se seraient pas fichu de produire, ni de concevoir, ni de commercialiser, et même pas d'acheter par eux-mêmes !
Le concept miracle est donc lancé : le « tourisme commercial » c'est la solution prête-à-l'emploi. Et comme tout miracle, il vient d'ailleurs ! Beaucoup de nos élus, de gauche comme de droite s'y seraient bien ralliés, s'en seraient enorgueillis au premier scrutin venu, n'était quelques rancœurs mesquines ou clivages partisans.
Nous vérons dans le deuxième épisode comment nous sommes entrés dans cette légende : McArthur avait plusieurs cordes à son arc. A suivre.