Le Front National est comme une baudruche que le système électoral gonfle
artificiellement au premier tour, et dégonfle sévèrement au second tour. Les politologues l'expliqueront par le plafond de verre des alliances, les frontistes par des manipulations criantes et honteuses, mais il y a des raisons plus prosaïques à son échec récurrent.
Comme un gamin gâté par la conjoncture qui lui est favorable, le Front National peine à ramasser les bombons que les adultes (pouvoirs, médias) lui
jette mais dont il ne sait en réalité pas quoi faire entre deux
distributions.
C'est que le succès quantitatif ne fait pas le succès qualitatif.
C'est pas parce qu'une entreprise sait vendre des produits qu'elle en maîtrise la technologie. Pour le FN, c'est le cas. J'ai pu l'observer de l'intérieur sur le terrain à Vernon et dans l'Eure depuis l'élection municipale.
Trop de petits cadres locaux du FN ne comprennent et ne s'intéresse en
rien à la politique en dehors de la logique électoraliste : Beaucoup sont des exécutants dévoués mais incultes sans autre vision que
la théorie des trois i :
immigration, insécurité, impôts, surtout pas
initiative, innovation, interaction !
Leur expliquer que c'est dans la culture, l'entreprise et dans la vie
sociale associative qu'est le seul lieu de transformation constructive
d'une performance électorale, c'est trop leur demander.
Le méta-politique ? c'est quoi çà, un truc pour intellectuels...
Que feront-ils de leurs élus à part décliner les directives du comité
central en attendant de les envoyer candidater au prochain scrutin ?
- Rien sinon organiser des galettes des rois et des diners dansants entre beaufs canal historique et nouveaux convertis opportunistes en quête d'aventure...
- Rien sinon distribuer des bons points et investitures aux militants méritants à jour de cotisation...
Or tous ces comportements infantilisants se voient, pas dans les médias, mais dans la vie réelle.
Or les citoyens ont besoin de s'insérer dans des réseaux de partenaires
actifs et productifs, pas de club de copinage et de loisirs patriotiques
!
Le FN paie au prix fort dans les urnes les effets du management populiste de ses cadres intermédiaires locaux, management du nivellement par le bas, à courte vue, mais il ne veut pas changer de méthode.
On retrouve là un phénomène que la gauche (la vraie, celle qui a connu
les luttes ouvrières) connaît bien pour l'avoir pratiqué :
Pour brider et contrôler la grogne populaire, canaliser les mouvements,
la technique est simple : nommez et promotionnez des petits chefs, ou
mieux, faites les élire, çà occupera les esprits sur des faux débats...
pendant que les politiques s'occupent des "questions sérieuses".
Par opposition aux syndicats usés et corrompus, le FN offre donc au
patronat un gros avantage : l'électorat ouvrier ou populaire qui s'y
rallie n'y trouve aucun débouché, aucun contre pouvoir, pas même un
terrain d'enrichissement intellectuel politique.
Juste un défouloir collectif et des lendemains qui chantent.
Tout cela ne fais donc pas du FN un réel danger, c'est à dire un réel
contre-pouvoir, et c'est précisément pour cela qu'une bonne part de
l'électorat s'en méfie : les classes moyennes surtout.
Mais cela, personne n'a intérêt à l'expliquer.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire