lundi 16 septembre 2013

Critique du soralisme ou le risque du pari sur la pensée politique complexe


Nous partageons avec Egalité & Réconciliation, le mouvement d'Alain Soral l'idée que la participation du citoyen ou du militant à la vie politique implique un investissement intellectuel personnel, une auto-formation continue, un devoir de se cultiver et que corrélativement une organisation militante doit stimuler cet effort personnel et outiller autant que possible son exercice en collectif.
Ce principe est lié à une autre idée :
Penser une question politique c'est d'abord se confronter à la complexité du réel et de ses représentations
d'autant que le champs politique est foncièrement puridisciplinaire.

MAIS ! il y a un mais.



Mais a contrario, vouloir partager une pensée complexe au delà du champs des relations inter-personnelles, c'est la dégrader d'autant plus qu'on étend la diffusion au grand nombre.
Pourquoi ? parce que comprendre un message complexe a un coût énergétique (temps cérébral = valeur économique) et qu'on investi plus ou moins d'effort dans une relation selon qu'elle est plus ou moins qualitativement impliquante.
Et d'autre part parce qu'entre l'analyse d'un problème et le débouché pratique, l'action opportune à mener, la posture à adopter, il reste une marge d'incertitude.
Du coup, à défaut d'offrir une lisibité synthétique, et d'exprimer un périmètre de validité, les messages complexes se diffusent, se reçoivent avec une dégradation incontrôlée.

C'est sous cet angle que l'on devrait d'abord examiner, et critiquer, "l'antisémitisme soralien" qui avant même de savoir s'il participe réellement des idées développées par E&R se manifeste comme une modalité de perception probable, implicite, voire hautement probable auprès de publics avides de schémas réducteurs.
C'est tout le problème de savoir si une critique du sionisme étendue à une critique récurrente d'une influence communautaire juive peut éviter l'écueil d'une dégradation en antisémitisme à peine euphémisé.

Nous faisons la même analyse à l'égard de Résistance Républicaine, le mouvement de Christine Tasin, qui, en désignant le combat contre l'islamisation et implicitement contre l'islam, risque d'induire auprès de son public une islamophobie collective, donc non raisonnée, au détriment de l'apport de témoignages, d'observations et d'analyses sur les faits, au demeurant bien documentés, qu'il conviendrait d'intégrer dans une approche politique globale clarifiée et constructive.
A fortiori quand il s'agit de se revendiquer islamophobe de plein droit.

Dans les deux cas nous craignons de voir se développer un rapport dialectique délétere entre
- d'un coté le système dominant qui promeut une pensée unique normative, notamment avec la lutte contre antisémitisme, contre l'islamophobie qui parce qu'institutionnalisée tend à susciter, même cultiver autant que réprimer ce qu'elle dénonce
- et de l'autre des mouvements d'opposition qui parce qu'en quête de public et d'influence, tendent à spéculer de fait sur une adhésion reflexe et massive à des thèmes "sensibles", sans en maîtriser les dérives probables.

A ce stade, nous posons qu'il convient de se méfier dès l'instant qu'on observe dans la reception du public :
- la trop forte personnalisation d'un mouvement autour d'un leader
- la pensée qui se développe en système (idéologie)
- la désignation d'un ennemi constant, d'un antagonisme binaire ou d'un combat prioritaire

Autrement dit le pari de la pensée complexe en politique est bien risqué !
Sommes nous condamné à choisir entre didactique et propagande ? L'une misant sur l'intelligence cultivée singulière, l'autre sur la bêtise moyenne de l'homme masse.


A cet égard nous observons que c'est probablement sur ce type de constat que Marine Le Pen a remodelé le projet et le positionnement du Front National, en développant une architecture programmatique globale, et en satellisant au dehors les mouvements "spécialisés", qu'on pourrait dire expérimentaux, sur des thèmes sensibles et fortement conflictuels.

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