Enseigner un langage informatique dès le primaire : la bonne idée d'un mauvais ministère

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J'ai toujours été favorable à l'enseignement d'un langage informatique aux enfants, voyant dans cette discipline un pont entre l'approche mathématique et celle de la langue, et des langages en général. La construction d'algorithmes simples permet d'acquérir des méthodes et d'appréhender ultérieurement l'algèbre plus naturellement. C'est aussi un pont entre l'abstrait et le sens pratique, la raison et le travail manuel. Enfin le fait est qu'il était paradoxal de confronter les enfants à des ordinateurs en classe sans poser préalablement l'objectif éducatif de maintenir le rapport de domination convenable de l'homme sur la machine, pas l'inverse. La machine étant en plus un média, on conçoit qu'il s'agisse d'une révolution !

Beaucoup d'élèves arrivent en fin de 3e sans savoir poser et distinguer la différence entre une donnée à nommer, un variable à déclarer, une constante connue, et une inconnue à calculer. Leur raisonnement se borne à enchainer des procédures opératoires sans plan d'ensemble et curieusement, peut de contraintes formelles de notation et de présentation ne leurs sont enseignées et imposées pour résoudre un problème.

Or, un langage informatique n'est rien d'autre qu'une syntaxe très normalisée pour bâtir des raisonnements complexes via des opérations sur des objets également normalisés. Rebutante au départ, cette contrainte offre un terrain d'apprentissage beaucoup plus "sécurisant", reproductible et partageable pour entrer dans l'abstraction.

Du projet à la réalisation : on a des doutes !

Si le ministre de la non-éducation non-nationale actuel, Benoit Hamon, annonce soutenir un tel projet nous pourrions nous en féliciter. Mais nous ne pouvons penser qu'il puisse le mener à bien. Car quand un socialiste entreprend un tel projet, on peut être sûr qu'il en pervertira les finalités comme il en compromettra les bonnes méthodes. Il ne faut surtout pas prétendre fournir un savoir-faire technique par la programmation à ce stade, mais y voir un complément, un renfort aux savoirs fondamentaux qui restent prioritaires. En plus si éveil à une culture technique il y a, il doit ne rester qu'élément d'une culture générale.

Après se pose la question : quel(s) langage(s) enseigner ?

Un langage de "programmation" comme le C ne peut être tel quel abordé en primaire. L'ancien BASIC avait des vertues intuitives mais initiera des approches périmées. Le HTML et ses dérivés ne sont pas des langages, mais sont intéressant car ils offrent des applications concrètes et structure la manière de concevoir un document dans son ensemble sur le critère du sens, là où l'usage d'un traitement de texte n'offre que des procédures (des "comment faire?")

Enfin reste la question clef : qui l'enseignera ?

Contrairement à une idée tentante, il faut avoir une bonne maîtrise du développement informatique pour pouvoir préssentir la valeur éducative d'une initiation même élémentaire. Et connaissant la culture informatique et technique moyenne des enseignants, majoritairement des femmes, on peut s'attendre au pire.

Oui, il y a bien là un problème de stéréotype de genre honteusement cultivé par ceux qui prétendre les combattre !